L’Europe et ses fantômes
Et si la démocratie athénienne inspirait la construction d’un nouveau monde post-coronavirus ? Ce n’est évidemment pas le sujet de cet épatant documentaire, réalisé avant la crise sanitaire, mais il a le mérite, et le très grand intérêt, de nous interroger sur notre rapport à la politique aujourd’hui. Où en est-on de la notion de bien commun qui dictait l’organisation de la cité à Athènes entre le vie et le ive siècle av. J.-C. ? Loin, très loin, même si nous nous efforçons de vivre dans l’illusion « que nous allions pouvoir vivre comme eux, un songe qui a traversé les époques depuis le xixe siècle », souligne l’historien Paulin Ismard.
Peut-on, et doit-on, continuer à se revendiquer du modèle grec ? C’est le postulat de départ de cette brillante démonstration, forcément philosophique, de cinquante-deux minutes. À commencer par l’Union européenne qui, en 1981, se réjouissait d’accueillir « un pays dont la culture et l’histoire sont les racines mêmes de l’Europe ». Trente ans plus tard, en 2015, ce berceau continental est désavoué sur la scène internationale pour la mauvaise gestion de sa dette. Pis, le pays d’Hippocrate voit les spin doctors du FMI ou de la Banque centrale prendre la main sur l’économie nationale, déjugeant les élus du peuple. Un labo de la rigueur et un coup de force qui mettent à mal les grands principes démocratiques de l’Europe. Faut-il tout recommencer ? « Non, juste porter ensemble nos propres rêves de démocratie », conclut ce doc. CQFD.
Etienne Labrunie – Télérama